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Qu'est-ce que c'est la discorde?



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Cours en différé du 18 décembre 2010- Partie 1 - Cours6 de Bernard Stiegler

Prise de notes - Partie 1

Protagoras : ce que décrit de Prométhée et d'Épiméthée, un mode vie technique, un autre modèle de vie pour nous les mortels, un mode vie en groupe. Et que ces groupes sont traversés par une tension interne qui tend à détruire ces groupes. Tout autant, qu'elle en constitue, le principe dynamique, elle tend à détruire et à construire en même temps le groupe.

Cette vie en groupe qui rassemble des êtres sans qualités, inachevés, cette vie en groupe est constituée non pas par une unité d'espèce (bovine, une identité génétique) mais par une inventivité (technicité), c'est un peuple d'inventeur. Mais le problème cette invention, c'est qu'il nous raconte ces inventions, ces fantasmes, ces histoires, c'est une facticité, une artificialité. Artifice dans lequel il y a le mot -art- et tout ça constitue une pharmacologie. Non pas au sens, d'une boîte de médicament, mais au sens du pharmakon expédiant sous toutes ses formes, un piège (pour attraper un ragotin) c'est ça l'éris. Le pharmakon c'est l'objet technique sous toutes ses formes qui peut toujours se renverser (un marteau peut servir à se taper dessus...). Cette technicité produit de l'éris, c'est à dire de la discorde.

Qu'est-ce que c'est la discorde?

pharmakon Éris jette une pomme de discorde, c'est la déesse qui sème la zizanie. Mais Éris c'est aussi un facteur d'émulation. C'est un facteur de discorde, mais c'est aussi un facteur de concorde. Il y a une bonne éris. Dans le monde des mortels, tout ce qu'il y a de mauvais c'est aussi bon et réciproquement c'est ça le problème. Dans le monde des grecs anciens (avant Platon parce que avec lui ça va changer), il n'y pas des gentils d'un coté et des méchants de l'autre, ça n'existe pas, il y a que des gentils qui sont aussi méchants, chez les mortels. Chez les dieux c'est des problèmes qui ne se posent même pas, ils sont ni gentils, ni méchants, ce sont des dieux.

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L'éris que nous voyons-là, cette pomme qu'elle est entrain de jeter, c'est l'éris des dieux car il y a de l'éris chez les dieux. On la voit au moment du mariage de Thémis, et donc chez les dieux l'éris n'est que mauvaise. La déesse Éris, chez les dieux est une déesse de la discorde, elle représente que la discorde. Toute une histoire
Zeus c'est le fils de Cronos, parmi les fils de Cronos, il y a les olympiens d'un coté les titans de l'autre. Titans (Prométhée et d'Épiméthée), les olympiens en rapportant la victoire contre les titans les ont asservi, ils les commandent. Donc, Prométhée est obligé d'obéir à Zeus, mais il ne cesse de se venger, de lui jouer des tours. Et ça joue des tours à nous les mortels. C'est le conflit entre Zeus et de Prométhée qu'est à l'origine des mortels. C'est ça le cœur de la religion grecque. Les cultes grecs sont toujours à vouer, à célébrer le conflit des olympiens et des titans dont les mortels sont issus et la victoire de Zeus. Et à travers ces sacrifices et de faire soumission à Zeus.

Dans ce conflit, les mortels naissent et cette naissance des mortels transforme l'éris. Dès que l'on se place au point de vue des hommes le tableau change à propos de l'éris, il n'y a plus une seule éris mais deux éris. Et ce dédoublement de la fille de Nuit (Éris c'est la fille de la déesse Nuit) correspond à la toute puissance qu'elle exerce sur la vie des hommes à sa présence constante dans et pour le bien comme dans et le pour le mal. Elle est l'unité du bien et du mal.

Sous sa forme contrastée, dédoublée, ambigüe, l'éris est consubstantielle à la condition humaine. La mauvaise éris à déjà deux faces comme il y a deux sortes de méchantes querelles. Chez les hommes la guerre à l'étranger ennemi, les ennemis qui sont les étrangers sur le champ de bataille. Les discords à l'intérieur même de la communauté. Les ennemis de l'extérieur - les ennemis de l'intérieur, dans un langage guerrier. Sur la place publique, là, où on s'affronte et c'est ce qui a de pire pour les grecs, pour les athéniens en particulier, la guerre civile, c'est leur hantise... Combattre les adversaires c'est la règle, ce sont des guerriers les grecs, normal de combattre à l'extérieur mais se combattre entre soi c'est l'horreur absolu c'est ce qu'on appelle le combat fratricide.

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La première éris, s'appuie sur la force du bras, la seconde à l'intérieur de la cité, l'éris c'est ce qui donne l'éristique la confrontation orale mais qui tourne et quand elle tourne mal à la guerre civile. (C'est ça le point de départ de Socrate, c'est ça que préoccupe Socrate).

Mais avant de donner naissance à cette éris querelleuse, dont la volonté divine a fait malgré eux la compagne des mortels, Nuit (la mère d'Éris) en avait enfanté une autre (éris) semblable mais de cœur opposé et dont le sage doit chanter les louanges (Hésiode). C'est elle qui éveille au travail, (c'est la déesse du travail) par émulation, tout homme qui voit l'abondance prospérer sur les champs et dans la maison du voisin s'adonnant mieux que lui au dur labeur... La vie agricole des grecs.

Source

Je vois mon voisin qui travaille mieux que moi, ça me stimule et ça m'améliore, ça me met au défi, de devenir meilleur...L'aristocratie, ce n'est pas ceux qui ne travaillent pas, c'est le principe de l'amélioration. Ici, il parle de l'éris de concurrence, je pense qu'il a tord, je comprends pourquoi il dit ça, car dans concurrence, il y a concours, c'est le fait d'être en concours... Il y a des concours partout en Grèce.

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MAIS aujourd'hui, nous devons distinguer la concurrence de l'émulation!

Parce que la concurrence, telle qu'on nous l'a vend aujourd'hui par exemple : à la commission européenne, c'est une commission qui a pour but elle ne le dira pas mais c'est ce qu'elle fait.

De faire, qu'on tue les autres, on leur marche dessus, on les écrabouille. Et cette concurrence-là, ce n'est plus une émulation pour rendre meilleur, c'est une lutte pour la vie pour détruire l'autre. Pour la conquête du monopole. C'est ce qui est aujourd'hui la réalité de cette concurrence. C'est pour ça que je tiens à distinguer; émulation et concurrence. L'émulation est indispensable!!!

L'émulation c'est quelque chose de merveilleux, qui nous grandit. La concurrence ça conduit à la mauvaise éris. C'est cette concurrence querelleuse, méchante, agressive, où il faut tout faire pour détruire l'autre qui est la mauvaise éris.

Quand j'ai repris mes études à 32 ans, j'avais constaté que la concurrence est plus forte que jamais et qu'elle freine en plus.

On pourrait croire que la concurrence est symbole de croissance?

Ma première reprise, elle s'est tellement bien passée que j'ai été première de classe, j'apprenais tellement bien. À la fin de l'année, ils donnaient des prix, je n'ai pas accepté, justement par rapport au groupe, car nous formions et nous nous soutenions dans ce groupe! La concurrence, oui, dans le groupe mais pas pour eux! Il restait 3 mois j'avais déjà appris ma maintenance en informatique et je vous voulais apprendre plus que le DOS et HTML... Pas pu donc, j'ai aidé les autres. . Ils devaient suivre un programme bien défini. Dans les recherches d'emplois, je n'en parle même pas, j'ai eu toutes sortes. Voir du préjugé à la drague, bref de toutes les couleurs! Le comble dans tout ça, nous étions 20 et chaque mois, la directrice renvoyait 1 élève par manque d'étude ou pas assez assidu... (Une déchirure pour nous car nous étions très unis). Et sur les 9/10 diplômés, le seul qui n'a pas de diplôme trouve un boulot grâce à son père, par piston. Elle n'est pas belle la concurrence?

Je reprends donc mes études de 3 ans cette fois-ci, en webdesign. Même problème : programme défini une guerre même avec le directeur pour apprendre Drupal mais comme cela mettait une concurrence avec un autre professeur de Joomla, ce n'était pas possible pour lui. Du coup, j'ai fait aussi infographie car il restait 1 an.

Les derniers temps, je tournais en rond. Dans leur programme, il y avait un quota à respecter pour insérer. Tellement à respecter qu'ils avaient soit disant fait venir un entrepreneur millionnaire, il vient fait un discours, insistait sur sa famille richissime... Tous emballés, voir aller jusqu'à Paris... Mais quand on vend du "rêve américanisé" je vérifie toujours. Je tape son nom sur internet. Je vois qu'il vient de sortir de prison, car il vendait des faux billets d'événement... Il avait donc besoin de graphistes. Je ne disais rien, j'observais les autres, avec des yeux qui brillent, des sommes qu'il proposait. Quand il est parti, j'explique cela au directeur et pas de conséquence pour le RH?

Bref, tout pour avoir leur quota mais s'en foutent où ils mettent les gens, la RH imaginait déjà la concurrence entre nous car il en voulait que trois. J'ai donc décidé d'arrêter 3 mois avant la fin avec un accord à l'amiable avec le directeur, j'ai bien reçu mon certificat d'études, de webdesigner et d'infographiste aussi. De plus, il savait très bien que pour moi, pas possible de m'insérer n'importe où. Même très fier de moi de ma décision! Et signer un contrat qui m'enfermerait dans un programme défini, impossible pour moi.

La concurrence freine dans les idées, les créations, l'apprentissage... et surtout le groupe à trop vouloir de reconnaissance! C'est peut-être, ça que j'ai jamais eu d'emploi ou autre chose mais à chaque fois que je devais signer c'est comme-ci, je devais signer avec le diable, comme quand on prend une vie, toute une vie pour faire plaisir à l'autre et non à soi (pas le soi d'égoïsme mais le soi d'identité, une sorte de perte d'identité).

La concurrence, je la vois comme une corrida, un combat truqué, le taureau mourra au final et quand un taureau tue le toréador (très rarement), les gens sont contents comme le pauvre gagne sur ce coup, très rarement aussi. Un très beau spectacle apparemment, d'us et coutumes!

J'ai préféré l'émulation...

De plus, l'émulation a sauvé ma vie mais elle tombe inattendue, comme un coup de foudre, comme un amour. Mais je ne peux pas raconter dans ce système, c'est comme-ci, avoir un pied dans ce système de paperasserie, système algorithmique qui n'a rien avoir avec l'irréel, c'est bien une réalité, une liberté ( exemples : chiffre du chômage irréel / Chômeur : réalité et il crée, il vit... Emploi : défini voir irréel/ Travail : du concret) Et avec... amour, passion, envie, besoin vital, pas de reconnaissance, plaisir, désir, liberté, l'infini, création, un but ou alors même si on rate, pas grave, l'inconnu ou impression que c'est ça et pas autre chose... Le seul endroit, où je n'ai jamais croisé la concurrence, malgré tous les groupes que j'ai pu croiser. C'est un besoin vital, car quand on ne l'a pas car cela arrive par période, on pleure comme un gros chagrin d'amour mais pas pour une personne mais bien parce que l'émulation n'est pas là.

L'émulation fait levée des montagnes.

C'est pour ça que sur mon site, il n'y a qu'une partie car on pourrait prendre ça comme un "travail". Mais tant que je sais, pas besoin de reconnaissance à la liberté, car il y a tant de sorte de langage, de mille façon de s'exprimer.

Le soir, je vais sur Facebook, je regarde comment la tv s'incruste dans le web car je le vois comme une espèce de prise de contrôle de l'esprit... j'essaye de comprendre, je classe... Et pourtant dans ce virtuel (car ils essayent de faire un langage de tv), j'arrive encore avoir le peu d'"émulateur" qui reste. Occupy, Co une rawette et autres ...c'est bien sur Facebook que nous nous sommes croisés pour en faire des actes. C'est pour ça que je ne suis pas tout à fait d'accord au sujet de Facebook. Il faut juste bien observer.

Et je ne parle pas des métiers qui se perdent, par la robotisation, automatisation... Mais aussi la vocation se perd et il ne reste que le gagne-pain! Un grand danger, car il va y avoir plus d'imposteur.

Comment est-ce possible que ce système en est arrivé... Pas d'emploi, interdiction de travailler? Je ne parle même pas du travail au noir mais un bête exemple : quand on est au chômage, on ne peut même pas mettre en couleur sa façade, si non, on est sanctionné! C'est interdit! C'est bien la maîtrise des gens qu'ils veulent et non pas la création, l'évolution... je pourrais en donner des milliers d'exemple!

Ma petite conclusion, il faut absolument une addition ou une soustraction à ce système à ceux qu'ils n'en veulent pas faire partie car comme solution pour le moment : c'est la prison, la mort dans la rue, asile... Si non on court à la catastrophe aussi bien que pour l'humain mais aussi pour la terre! Il faut vraiment une urgence que tous ont un minimum pour vivre dignement.



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Chez les hommes, éris devient pharmacologique comme tout ce qui est mortel. Tout à deux faces chez les mortels comme le dieu Janus, c'est évidement issu de la suite du conflit entre Zeus et Protagoras, où Zeus se venge sur les mortels de la ruse de Prométhée - la ruse du feu (les mortels ne sont pas encore des mortels, ils ont encore accès à la pousse spontanée des fruits, comme dans le paradis de la bible, tout pousse tout seul, on n'a pas besoin de travailler, l'âge d'or. Où, il y a des pommes d'or (les mythes sont toujours contradictoires), les mortels ne sont pas encore mortels et pourtant ils sacrifient déjà.

Toute une histoire


Et dans le sacrifie qu'ils vouent à Zeus, Prométhée pour se venger dans sa querelle avec Zeus a caché sous la graisse du bœuf, puisque dans les sacrifices, celui qui sacrifie la bête, sacrifie toujours ce qui existe dans le monothéisme, même si dans le monothéisme chrétien c'est le sacrifice du Christ lui-même. Dont, je rappelle ce qui vont à l'église le dimanche qu'il le mange, tous les dimanches matins le Christ, ne l'oubliez pas, vous avez des comportements cannibales. Vous mangez votre prochain, et même le plus prochain du prochain! Votre cœur même, vous vous mangez votre cœur même dans la même occasion. (À la différence, des autres qui préfèrent manger du mouton, par exemple les musulmans) et bien vous (chrétien) vous mangez dieu lui-même, mais c'est sa demande c'est lui qu'il a voulu. Quoi qu'il en soit vous vous l'incorporez, c'est ça l'eucharistie.

Ce sacrifice, quand on mange du vivant en particulier animal, on doit toujours en rendant grâce, non pas à Dieu mais aux dieux (chez les grecs). Chez les grecs, on ne tue pas un animal sans que le Mágeiros qui veut dire le boucher en grec (Imam en arabe, Rabbin en hébreu) et tuer la bête, on ne peut pas tuer une bête si on n'est pas Mágeiros. Et le Mágeiros tue la bête et une fois qu'il a tué la bête avec le couteau, il l'a tue en plongeant le couteau dans son aorte et ensuite il jette le couteau au loin parce que le couteau est maudit de ce meurtre. Ensuite la bête est découpée, elle est ouverte, on sort ces entrailles, on sort les graisses de son ventre... Et on la laisse rassir et une fois qu'elle est bien rassise, on la fait griller mais on prend les meilleurs morceaux on les offre.... On les brule sur un autel, on les fait griller, avec des herbes aromatiques, le barbecue vient de là et si vous mangez, de la si bonne, côtelette d'agneau en Grèce, si bien préparé , c'est parce que c'est une très longue tradition de cuisine sacrificielle, les meilleurs côtelettes d'agneau c'est en Grèce qu'on les mange mais aussi les rognons, le foie, le cœur... On départ les meilleurs morceaux pour eux ce sont le cœur et le foie. Ils les font bruler avec des aromates pour Zeus et ça monte à Zeus. Une fois que tout ça a bien brulé, ils mangent ce qui reste.

Un jour, Prométhée, il met tous les bons morceaux de coté et il met sous la graisse, où d'habitude on conserve car il faut conserver tout ça des mouches. On conserve tout ça sous les graisses et à la place des viandes et des bons morceaux, il a mis les os de la bête. Et Zeus est absolument furieux! Et il va se venger sur les mortels. Car c'est toujours sur nous, que ça retombe. Les querelles entre les dieux, pas que nous... le foie de Prométhée qui se fait manger par le vautour, c'est quand même bien pour Prométhée sauf c'est chez nous que ça se traduit, cela s'appelle hypocondrie, la mélancolie, la prise de tête se qui fait qu'on a du mal à digérer... Et que finalement, on se fait du souci, on se fait de la bile, on broie du noir, on pense à sa mort, à la mort des autres...

Au deuil, on est hanté par ça.

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Dans le premier sacrifice, qui est raconté par Hésiode... La vengeance de Zeus, c'est comme ça, à partir de maintenant, les mortels s'ils veulent trouver leur pitance, il faudra qu'ils travaillent. Il faudra qu'ils aillent retourner la terre... C'est une autre version comment les mortels sont devenus des techniciens. Il a aussi enlevé le feu, il va falloir qu'ils fassent leur feu, eux-mêmes... À partir de là, les hommes doivent travailler...

Qu'est-ce que c'est la mauvaise éris?

La mauvaise éris ce dont Socrate accuse ce personnage d'être une cause. Ce personnage c'est un grand personnage : Gorgias. La mauvaise éris dit Socrate: Socrate n'appelle pas ça la mauvaise éris, il parle du mauvais esprit qui frappe à cause de l'éristique des sophistes.

Ce qui produit de la désindividuation, du chacun pour soi, de l'individuation collective. Vous vous souvenez que dans le cours précédent j'ai parlé de l'individuation psychique qui est toujours en même temps une individuation collective. On ne peut pas s'individuer psychiquement, individuellement sans participer à l'individuation du groupe c'est à dire sans être pris dans un groupe, sans participer au groupe.

L'éris c'est ce qui produit de la désindividuation, c'est ce qui va atomiser le groupe, que chacun se sépare du groupe, se repli sur lui-même, se sépare des autres. Ce qui conduit au dégoût de soi, et au dégout des autres. Aujourd'hui cela conduit à la perte d'exister. À la perte du sentiment de s'individuer, avoir le sentiment d'exister, c'est avoir le sentiment d'augmenter son être. Par toute sorte de façon de vivre, soit en apprenant quelque chose de nouveau, soit en apprenant quelque chose à quelqu'un d'autre, soit en mangeant quelque chose de très bon... Augmentation de sa puissance d'agir.

Quand on perd le sentiment d'exister, on perd le sentiment que la vie vaut la peine d'être vécue. À ce moment-là, on ne respecte plus la vie. Ni la sienne, on peut devenir suicidaire, ni celle des autres, on peut devenir criminel. Cette mauvaise éris, Socrate la voit dans Gorgias, dans un dialogue qui s'appelle Gorgias : Socrate discute avec Gorgias et avec un autre sophiste Polos et Calliclès. Socrate discutant avec Polos, pour s'individuer, pour être, il faut vivre à la participation du groupe, avec le groupe et pour le groupe, et non contre le groupe jamais contre le groupe. On ne peut jamais être heureux, si on fait du tord au groupe. Même s'il faut mourir pour le groupe, on sera heureux de mourir, que de faire du tord au groupe.

Toute une histoire










Il vaut mieux être une victime juste qu'un bourreau injuste et on est plus heureux en étant qu'une victime juste qu'un bourreau injuste.

C'est important dans notre époque très populiste, où à la télévision qu'on nous sort ce genre d'argument et on n'empêche les gens de penser et de raisonner. On les conduit à la position de Polos. Elle est très grave la position de Polos. Elle consiste à dire pour être heureux, il ne faut pas respecter la loi. C'est ça l'enjeu de la position de Socrate. Quand Socrate parle ici : de bonheur (il ne s'agit pas de passer des nuits comme Berlusconi avec des filles, ce n'est pas ça le bonheur).

Le bonheur c'est d'atteindre la plénitude de son destin, d'être heureux d'être soi et d'avoir l'Eure (chance- destin) d'être juste.

De quoi parle ce dialogue? Platon fait dire à Socrate ce qui va lui arriver. C'est ce qu'à fait Socrate, il a bu la cigüe, jusqu'à la dernière goute. En disant : je préfère subir l'injustice que de me dédire et de devenir du même coup injuste. D'avoir menti après coup à tous ces jeunes athéniens à qui je disais il faut jamais se soumettre au mensonge à l'erreur. Je préfère boire la cigüe me soumettre à la loi que de plutôt de trahir la loi et donc de dédire tout ce que j'ai toujours dit!

Pourquoi la loi? La loi peut se tromper, ça arrive que la justice se trompe, il y a toute sorte d'erreur judicaire. Socrate dit : si la loi est prononcée, il faut la respecter.

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Stiegler : Socrate participe à l'individuation de la cité, jusqu'à la fin. Et donc à l'extrême, Socrate lie son destin individuel au destin collectif jusque dans la mort. Qui est à la fois la fin de son individuation, il a atteint le terme de son individuation car il est mort mais aussi le début se que nous faisons ici, à savoir de la philosophie. C'est comme ça que naît la philosophie. C'est sur la base de ce sacrifie, pour ça qu'on a souvent reproché Socrate de Jésus-Christ et de bouddha. En quelque sorte, Socrate se lie à mort à la cité. Il est l'ami de la cité (nous sommes ami à la vie et à la mort).

Du même coup, Socrate qui est le premier philosophe, se lie à mort en inaugurant une attitude philosophique. Pour bien comprendre Platon, il faut lire :

Socrate attend dans sa prison, de boire la cigüe, un événement fait que qu'il ne peut pas boire la cigüe tout suite pour une raison rituel. Il la boira 3 ou 4 semaines plus tard, normalement il devait le boire juste après son procès. Donc, Criton va le trouver...J'ai arrangé ton évasion, il y a un bateau qui t'attend, tout est prêt, nous tes amis avons tout préparé, tu peux t'en aller tu es sauf. Il refuse! Si je me sauvais que deviendrait mes enfants, au contraire, c'est parce qu'il va mourir qu'on pourrait se demander que vont devenir ses enfants. Mais Socrate ne se pose aucun problème pour ses enfants, la cité s'occupera de ses enfants. Mais s'il se sauvait alors ses enfants seraient damnés, ils seraient rejetés de la cité. Ils ne pourraient plus être des enfants de la cité, donc ils seraient orphelins.

Être ses enfants ce n'est pas être les enfants de Socrate c'est être les enfants de la police, de la cité des lois. Il vaut mieux qu'ils soient orphelins de Socrate que de leur cité. C'est pourquoi dit-il, il faut ou bien ramener la cité par la persuasion, il faut convaincre la cité. Et si on n'arrive pas à la convaincre ... et bien il faut faire se qu'elle ordonne. Si ordonne de boire la cigüe il faut la boire. C'est ça la justice. Même quand elle est injustice il faut la respecter, c'est ça être juste. Elle est forcement injuste par ce qu'elle est pharmacologique. Il n'y rien qu'il soit pur dans le monde humain, dans le monde des mortels.

Il faut soutenir la justice et ces lois sans réservent à la vie et à la mort et surtout en sachant qu'elle peut toujours se tromper. On peut vouloir les changer les lois, bien entendu! C'est ce qu'essaye de faire Socrate justement. Mais pas en ne les respectant pas, il faut convaincre le reste de la cité. C'est une grande leçon, de paix sociale et de lutte politique.

Comment mener une lutte politique? Jamais par la violence!

La mort de Socrate pour moi pour tous ceux qui lisent Socrate et Platon, c'est l'héritage pour nous, d'une obligation. C'est celle de continuer d'interpréter les lois de la cité, les respecter mais essayer de les changer parce qu'il faut toujours les améliorer. Chercher à les interpréter par delà la mort de Socrate, tout autant qu'à partir de cette mort de Socrate qui devient la survie de Socrate, comme on parle de surhomme, une vie qui est plus grande que la vie. Il y a une survie, cette survie de Socrate, les grecs lui donne un nom : Kléos que l'on traduit par "gloire", dans le langage contemporain, on dirait la "réputation", la "reconnaissance" par les autres, l'"estime".

pharmakon Ce que cherchent les grecs c'est d'être estimés au-delà de leur mort et qu'on ne les oublie pas. Les plus grand de l'estime se sont les combattants chez les grecs. Socrate a été combattant, Platon aussi, ils ont tous fait la guerre. Ils n'achetaient les conscriptions comme faisait la bourgeoisie (19siècle) qui payait des pauvres pour aller mourir à leur place. C'était inconcevable chez les grecs, jamais un grec n'aurait fait une chose pareille! Il aurait été chassé de toute façon de la cité. C'est nous les modernes que nous sommes capables de faire des choses comme ça mais chez les grecs ce n'est pas concevable!

Tous les grecs faisaient la guerre, au combat fallait être pas forcement héroïque mais courageux et il fallait conquérir son Kléos...

Cette postérité que Socrate recherche, du moins tous, il y a que ça qui fasse que la vie vaut le coup d'être vécue. Et cette postérité n'est pas forcement dans la mort, qu'on donne aux autres... On peut être le sculpteur Phidias.

Cette postérité-là, nous allons voir progressivement, Platon va la transformer en changeant progressivement le discours de Socrate, il va le faire parler autrement. Parce que petit à petit Socrate devient entre les mains de Platon une marionnette. Qu'il fait monter sur la scène philosophique et qu'il anime et à qui il fait dire un certain nombre de chose, qui sont contradictoires avec ce que disait Socrate au début. Ou bien que Socrate s'est contredit ou bien c'est Platon qui à réinterpréter la vie de Socrate au fil de 40 années au cours desquels il a écrit ses dialogues. Ma thèse, c'est la deuxième, je pense que c'est Platon qui a modifié petit à petit, je vous dirais pourquoi, selon moi, parce que je peux me tromper ce discours de Socrate.

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Socrate c'est un mortel, il parle des mortels mais Platon va lui faire dire progressivement, surtout à partir du dialogue qui s'appelle Phèdre, qu'il est immortel! Comme un Dieu, et pour un grec tragique c'est inconcevable... un blasphème! C'est ce que Vernant nous explique que les mortels sont sur un coté et que les immortels sont dans un autre... En aucun cas, un mortel peut devenir un immortel! Jamais, le sacrifice grec sert, justement à nous rappeler que nous ne pouvons pas devenir des immortels. C'est à dire des Dieux. C'est ce que Platon va tenter de nous faire croire.

Socrate meurt et il sauve son Kléos, un des plus grands des "Kléos", Socrate tout le monde le connait... Et ce qu'il lui obsède, lui il ne parle pas de son Kléos, pour lui le Kléos c'est la justice, c'est indissociable. La question de la justice c'est l'obsession de la cité grecque. C'est la question de l'individuation en tant que une individuation juste, c'est une individuation psychique qui coïncide avec l'individuation collective. Je m'individue psychiquement pour moi-même dans la mesure où mon individuation psychique conduit à l'individuation du groupe, au renforcement du groupe. À l'intensification des liens dans le groupe. Évidement ce n'est pas simple, cela, si c'était simple ça voudrait dire que l'individuation psychique coïncide avec l'individuation collective. Hors ce n'est pas du tout le cas chez les grecs et en aucun cas les grecs ne disent cela, ça c'est que dit le MONDE TOTALITAIRE.

Zinoviev quand il explique ce que c'est le stalinisme, c'est ça, c'est lui qui parle de société totalitaire. Vous êtes totalisé, vous devez être absolument égal à la communauté du communisme et on vous dénie toute possibilité de ne pas penser comme les autres, ça c'est le stalinisme, c'est aussi certainement pour une grande part le maoïsme et surtout Hitlérisme. Quand je dis surtout... l'hitlérisme en a fait son principe de base, sur la base d'une mauvaise éris fondamentale sur la haine de l'autre. Ce qui n'est pas le cas du stalinisme et du maoïsme. Ça conduit à ça mais ce n'est pas ça qui est à l'origine de se devenir totalitaire. Non, l'individu psychique, dans la société grecque ne coïncide avec l'individuation collective avec le groupe tout au contraire, il se distinct du groupe! Et cette distinction pour le groupe est une chance. Mais cette chance peut devenir une source de malchance, c'est à dire de conflit. C'est une situation, pharmacologique.

Ces conflits, c'est ce que raconte le mythe de Prométhée qu'on a lu, les hommes qui s'autodétruisent parce qu'ils sont en conflit les uns avec les autres. Et du coup, il faut soumettre ces conflits à des règles, des lois. Ces lois doivent (Zeus envoie Hermès aux mortels qui sont entrain de s'autodétruire, il envoie Hermès leur apporter la compétence politique) et ces lois qui doivent sa donner à eux-mêmes (car Zeus ne dit pas voilà la table des lois, ce n'est pas Moïse, Hermès leur dit : je vous donne la compétence politique débrouillez-vous, inventez vos lois, il n'y a pas de loi divine). Ces lois doivent rendre possible une liberté qui ne détruit pas la communauté. Elles doivent permettre à l'individu de ne pas coïncider avec la communauté sans la détruire mais au contraire, en l'enrichissent, c'est en ce sens qu'elles doivent être dites juste. C'est en ce sens qu'elles doivent rendre la liberté de l'individu, juste, elle aussi. Et rendre juste cet individu lui-même à travers son individuation.

Ça veut dire entre l'individu psychique et entre l'individu collectif, il y a un écart et que cet écart est un processus dynamique, d'une justice en route, c'est une justice qui n'arrête pas de se transformer, c'est une justice qui n'arrête pas de s'améliorer. Ce n'est pas une justice figé avec une règle écrite une bonne fois pour toutes, c'est une justice qui va donner ce que nous appelons-nous l'HISTOIRE. Qui n'arrête pas de changer les textes de loi, c'est pour ça que les citoyens grecs vont tous avoir le droit de proposer des changements de lois mais à une condition, c'est de respecter la loi. S'ils ne respectent pas la loi, alors là, ils seront bannis!

Nous sommes quand même bannit, et on ne peut pas participer à la cité SAUF pour consommer ou vendre (et encore!).

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L'individuation psychique et collective "politique" qui naît dans la cité grecque, au 7 siècle avant J-C est fondée sur la liberté des citoyens. De telle sorte que cette liberté engendre nécessairement aussi des conflits et des injustices. Forcement, à partir du moment, où, on crée cette possibilité de liberté, la justice c'est ce qui va toujours devoir essayer de faire avec l'injustice. La rendre possible, ne pas la tolérer, mais en créant la possibilité néanmoins y compris en étant injuste elle-même. Il faut courir ce risque de la loi.

Cette forme-là, d'individuation psychique et collective, elle n'apparait que chez les grecs. C'est pour ça que je tiens à la Grèce. Je ne dis pas que la Grèce est supérieur aux autres sociétés, à la Chine qu'à l'époque est très développée, à la Judée qui est entrain de naître qui est une autre source de notre société ou à toutes sortes d'autres pays comme par exemple l'Empire Noir du Soudan, ect... Toutes ces grandes civilisations sont des GRANDES civilisations, dont l'Empire Noir du Soudan on l'a complètement effacé, comme-ci, ça n'existait pas! Comme-ci, les noirs n'avaient pas droit à une civilisation!

Je ne dis pas que cette forme grecque est supérieur, mais je dis que je tiens à cette forme-là, MOI, je tiens à cette forme et quoi qu'il en soit que j'en tienne ou pas. Si comme vous l'avez vu, le premier ministre chinois (communiste) a racheté le Parthénon, il y a 2 mois... Quand je dis qu'il a racheté le Parthénon, j'exagère, mais enfin, il a quand même racheté les dettes de la Grèce en partie. Il est entrain de prendre le contrôle de la Grèce comme la Chine prend le contrôle des terres arables africaines et de toutes sortes de terrains dans le monde entier et après tout tant mieux pour la Chine. Espérons que cela ne la rendra pas bête, espérons que cela la rendra plus intelligente... Pourquoi pas. Ça dépend de nous en réalité, de notre intelligence de la Chine.

Lorsque la Chine vient en Grèce et s'empare aussi des codes informatiques de toutes les technologies y compris de notre Airbus, de notre TGV... C'est ce modèle occidental qui migre vers la Chine, qui devient chinois. Ce que je suis entrain de dire, d'accord prenez tous ça mais prenez la liberté avec. Prenez la philosophie Socratique avec, ils y sont prêts d'ailleurs, je peux vous dire qu'en Chine, dans les écoles chinoises, dans les universités chinoises, on connait Confucius mais on étudie aussi Socrate. Qui étudie Confucius, ici? Pas grand monde, malheureusement.

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Ce qui nous a appris, c'est que cette individuation psychique et collective grecque, et bien c'est une individuation psychique, collective ET TECHNIQUE!

- Il y a individu psychique

Exemple : Socrate ou vous et moi.

- Il y a un individu collectif

Exemple : Athènes, la France de Brice Hortefeux "ministre", donc il faut le respecter c'est aussi ça la loi, c'est aussi ça que nous enseigne Socrate, mais c'est parfois compliqué, une vaste question que l' on pourrait ouvrir ici, la question de la légitimité de loi et de ceux qu'ils la mettent en œuvre. Évidement, Monsieur le Ministre, Il faut que vous la respecter la loi pour que l'on vous respecte! Oui, fermons le sujet!

L'individuation psychique et collective grecque, nous avons vu dans Protagoras que c'est aussi une individuation TECHNIQUE. C'est parce que la TECHNIQUE se transforme, puisque l'individu psychique et collective n'arrête pas d'inventer sans cesse des techniques nouvelles. C'est parce que la TECHNIQUE se transforme sans cesse, que la cité se transforme elle-même sans cesse. La base de la cité, la base de cette forme de vie qu'est l'individu psychique et collective, c'est sa technicité. C'est avant tout un technicien, et sa liberté c'est d'abord, sa liberté de produire de nouvelles inventions, y compris des concepts. Un concept c'est une invention, une invention technique même. C'est ce que dirait jamais Platon, c'est anti-platonicien ce que je viens de dire. Je suis plus proche de Deleuze que Platon sur ce sujet-là.

Il y a eu une individuation psychique et collective qui est aussi TECHNIQUE, et dans cette individuation TECHNIQUE à un moment donné conduit à l'écriture. C'est que cette écriture, c'est la technique politique. C'est ce que dis Hermès (le dieu de l'écriture), et c'est Hermès qui apporte le droit dans la mesure où il y a le dieu de l'écriture. (Voir cours précédent)

Vers 650, quand apparaissent les premiers textes législatifs ou juridiques, la royauté a disparu et jusqu'au souvenir de ces lointains palais. Depuis un siècle, au moins, l'écriture alphabétique est en circulation : les marchands, les poètes, les artisans, les particuliers, chacun use, à son gré et comme il l'entend. Simple, lisible, elle n'est, elle ne sera jamais réservée à des professionnels. Mais, à partir de 650, avec les législateurs qui choisissent de mettre par écrits les lois de la cité, l'écriture change de statut : elle devient opérateur de publicité, elle est constituante du champ du politique. Par l'audace de quelques-uns, conscients de l'enjeu. Solon, mieux que tout autre, affirme le geste fondateur : écrire les lois "semblablement pour le mauvais et pour le bon", au lieu d'imposer une tyrannie ou d'attiser les dissensions. Les règles fondamentales de la vie en cité, l'écriture les rend monumentales visibles et parfaitement lisibles afin que chacun se soumette à leur volonté. Une machine complexe leur sert de support dans Prytanée, dans un lieu de la décision politique : tables d'écriture dressées au centre de l'espace public, tableaux graphiques consacrant l'indépendance de l'écrit. Mais affirmant aussi la volonté d'agir, de transformer la vie publique, d'imposer de novelles pratiques que ce soit l'intervention de la cité dans les crimes de sang ou l'obligation pour l'assemblée de s'en remettre à la majorité.
Extrait de Marcel Détienne ~ Les savoirs de l'écriture en Grèce ancienne~


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Plus loin dans un autre passage... Détienne, explique que non seulement les lois sont gravées dans le marbre, situées partout où il y a du public, sur l'agora, aux portes, les lieux de sanctuaires... Elles sont peintes en rouge, pour être certain que les citoyens ne puissent pas dire je ne connais pas la loi. Si, tu la connais, elle est exposée publiquement!

Qu'est-ce la question de Wikileaks, si non, la question d'un nouvel opérateur de publicité?

(Réfléchir à cela), je ne dis pas ça pour dire que Monsieur Assange est un ange, certainement pas! Mais certainement pas un démon, non plus! C'est quelqu'un qui nous fait rentrer dans un nouvel âge de la publicité de l'espace public. Il va falloir arrêter de lui faire des misères, d'une manière judicaire fondée et commencer à réfléchir sérieusement, si on ne devrait peut-être pas, repenser une "respublica "une bonne fois pour toute à l'âge des natifs numériques et non pas des natifs de la lettre. Socrate est un natif de la lettre, Luther est un natif de l'imprimé, moi, je suis un natif de l'analogique (cinéma, radio, tv) mais les moins de 30 ans sont les natifs du numérique. Et c'est ça la question politique, c'est d'accueillir une nouvelle génération.

Comment produire de la bonne éris à partir de la mauvaise éris?

C'est la question de Dikê et Aidôs, qu'Hermès apporte aux mortels après le vol du feu commit par Prométhée. Veulent que Prométhée a dû commettre pour corriger la faute d'Épiméthée qui avait oublié de garder une qualité pour les mortels... À partir de là, ils s'entretuent, Zeus dit : maintenant qu'ils sont là il faut les protéger, donc il envoie Hermès pour leur donner Aidôs (justice) et Dikê (Honte).

Sentiment de l'injustice et de la honte, qu'Hermès présente comme un savoir technique (ce n'est pas ce que dit le texte de Platon, c'est mon interprétation) je soutiens que ce savoir technique est lié au savoir de l'écriture, comme on vient de le voir par Marcel Détienne à l'instant... Que tout le monde apprend à lire et à écrire, ça donne accès à tout le monde au sentiment du juste et de l'injuste. Pourquoi? Dans un autre passage, Détienne dit : à partir du moment où les tribunaux, écrivent tous ce qu'il dit dans le tribunal, on compare les arrêts des différents juges et donc il y a un comparatif de celui qui s'installe qui a lu une critique de la loi et on va dire que la loi n'est pas parfaite... Comment on peut améliorer la loi. Voilà, comment progressivement s'installer le travail de la justice, comme une dynamique de la justice. Changer la mauvaise éris qui engendre l'autodestruction, pour en faire une bonne éris, c'est ÉCONOMISER cette éris, la contenir, la retenir. Contenir ce qui constitue cette éris et dont on découvre dans un autre texte (Hésiode) que cela s'appelle l'Elpis.

L'Elpis qu'est ce que c'est?

C'est ce qui est dans la jarre de Pandora, l'Elpis (attente). Mais, il y a deux grandes catégories d'attente comme l'éris (la bonne et la mauvaise).

L'Elpis se divise en deux :.

L'Elpis comme crainte L'Elpis comme espoir
C'est la crainte des maux qui sont dans la jarre (l'Elpis se crée elle-même). Dans la jarre, il y a des attentes et l'attente s'attend au pire, par rapport à elle-même. Ce qui transforme ces maux, dont l'attente attend le pire d'elle-même en quelque chose de bien, en une bonne éris c'est à dire en une émulation


J'ai des attentes, ça peut être de très mauvaises attentes et je vais pouvoir ces mauvaises attentes en de bonnes attentes. En de bonnes anticipations, en de bonnes protentions, des bonnes façons de regarder le futur, l'avenir. Désirer quelque chose.

Mais ce que nous dit la jarre de Pandora pour que l'Elpis puisse devenir bonne, il faut la contenir, il faut la retenir, pas la lâcher comme ça! Il faut la contenir dans la sphère intime, discrète et même secrète de son cœur. Il faut pour la retenir adopter une certaine retenue, une certaine réserve. Les grecs appellent ça une "metron". Dans le roman "Le Guépard" raconte comment la bourgeoisie s'empare de la Sicile, la fille du bourgeois du coin s'empare de tout et on montre comment cette fille n'a aucune retenue. Elle se met à manger avec les nobles, elle est très vulgaire. Cette vulgarité de cette fille, aujourd'hui, on dirait qu'est ce qu'elle est raffinée quand on voit Berlusconi!

La retenue c'est ça!

Les 2 formes de l'Elpis constituent les pulsions (Freud 1921). Il s'agit de retenir les pulsions, pour les transformer en DÉSIR. Vous désirez quelqu'un absolument mais vous êtes d'une délicatesse avec ce quelqu'un que vous désirez, vous retenez votre désir. Et ce qui fait que vous retenez votre désir qu'il devient précisément du DÉSIR ET NON PAS DE LA PULSION. Cette retenue, que les grecs appellent la bonne éris, c'est ce que Freud appellera l'investissement d'objet. J'investis dans l'objet qu'est une forme d'émulation. Car l'investissement qu'est ce que c'est d'autre que l'émulation. Freud, lui donnera un autre nom, il appellera ça, la sublimation. Il dira que cet investissement c'est toujours un investissement dans le social. Vous tombez amoureux d'une jeune femme ou d'un monsieur, vous décidez de vous pacser ou de vous marier et vous fondez une cellule sociale.

La bonne éris est au service de la construction sociale, là, où la mauvaise éris est aussi la destruction sociale. Cet investissement, c'est ce que les grecs vivent, tous les 4 ans, à Olympi, aux jeux olympiques... Tous les grecs qui se font la guerre tout le temps... Ils font la trêve, et eux qui se détestent, qui se combattent avec une violence inouïe. D'un seul coup, ils se mettent à jouer ensemble, respectant les règles des jeux olympiques. Une fois, les Spartiates ont trahi la trêve et ils ont été punis par l'ensemble des grecs, ils ont été exclus des jeux olympiques et ils sont rentrés dans le rang.

L'investissement social, la sublimation, c'est ce à quoi, les jeux olympiques servent au niveau le plus élevé de l'ensemble de la communauté des grecs. Dans l'ancienne cité grecque, il y a beaucoup, des dizaines, des centaines de petites cités qui se combattent les unes, les autres. Il y a quand même une unité plus grande qui fait qu'avec le calendrier des olympiades. Tous les 4 ans, on se retrouve pour faire la paix et retrouver l'unité du peuple grec, dans son ensemble. C'est réputé d'être, l'atelier de Phidias, le grand sculpteur avait son atelier au lieu des jeux olympiques.

Au cours des jeux, qui se tenait tous les 4 ans à Olympi, les peintres, les sculpteurs, les poètes venaient et s'adressaient au public qui venait voir les extraordinaires athlètes qui jouaient ensemble. Et ils essayaient de faire connaître leurs peintures, leurs sculptures, leurs mosaïques, leurs poésies, leurs théâtre. De toute la Grèce, les grecs venaient, là, à Olympi et tous ces artistes cherchaient dans l'émulation de la bonne éris, à améliorer leurs Kléos, répandre leurs savoirs... C'est cela qui donne ce que vous voyez aujourd'hui, quand vous allez en Grèce que vous admirez.

Quand nous lirons le banquet que nous allons voir bientôt. Que L'émulation festive n'entre pas seulement enjeu dans la performance sportive (les jeux olympiques). La vie de la cité grecque est ponctuée en permanence de concours de toute sorte en particulier des concours de poésie, de tragédie. Le banquet raconte ça, pour fêter cet événement.

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Revenons maintenant à l'individuation, le groupe social est constitué techniquement et c'est ce qui établit le processus d'individuation psychique et collective. Le processus d'individuation, (Gilbert Simondon) chez tous les êtres humains et partout dans le monde. C'est ce qui est induit par l'inachèvement structurel de l'individu. C'est ce que Protagoras disait aussi, nous sommes des êtres artificiels, nous sommes inachevés, nous avons besoin sans cesse d'inventer des techniques pour essayer de nous combler. Et plus, on crée des ajouts, plus, on crée du défaut parce que, en fait, ces techniques, on des effets secondaires, ce sont des pharmakas, il faut que sans cesse trouver des nouvelles techniques pour compenser les effets pervers des techniques précédentes. On est pris dans une espèce de spirale.

C'est ça que signifie le défaut d'origine des mortels, le fait qu'ils sont sans qualités (Protagoras), c'est que le processus d'individuation, c'est le processus d'inachèvement. Ce que la préhistoire contemporaine l'appelle le caractère néo technique de l'être humain.

Ce défaut d'origine, car c'est parce qu'il y a un défaut d'origine, qu'il y a aussi un défaut d'inachèvement. C'est ce qui vous, les êtres mortels que nous sommes à sans cesse de devoir inventer leur destin, notamment à travers leur technique, ils doivent inventer des techniques mais aussi ils doivent inventer des lois, ils doivent tout inventer en permanence. De nos jours, nous ne dirions pas notre destin mais notre avenir. Le destin a une consonance divinatoire, et nous ne sommes plus des gens qui croyons au devin, aux astres... nous croyons qu'il y a de l'avenir. Et que l'avenir ne se réduit pas au devenir. L'avenir nous appartient, cela dépend de nous et pas simplement des chocs des électrons.

Inachevé individuellement, les mortels que nous sommes, nous transformons donc sans cesse et nous transformons dans la mesure où par exemple, nous faisons ce cours ou nous venons à ce cours, vous venez dans ce cours pour VOUS transformer, je donne ce cours pour ME transformer. Tout ce que nous faisons, réfléchissez-y bien, participe dans ce processus de transformation. Alors, après nous pouvons aussi faire des choses pour éviter de nous transformer. Par exemple : nous taper, une bière devant TF1.

pharmakon



Ce processus de transformation... Nous y sommes tous impliqués dans cette spirale et NOUS nous co-individuons, ces caractères d'inachèvement de la spirale, c'est ce qui produit l'HISTOIRE.








Non, ce pas Nicolas Sarkozy, c'est Napoléon à la conquête de la protohistoire, c'est à dire des pyramides. Et ça commence bien avant la protohistoire... En une journée, aujourd'hui, nous produisons plus d'invention que dans toute l'histoire. Réfléchissez-y bien, en termes de désindividuation, de déséquilibre du processus d'individuation, et c'est dans ce contexte-là, que la Chine apparaît! Et rachète, non pas le Parthénon, mais la dette grecque une partie de la dette grecque.

Suite deuxième partie





Ma compréhension par rapport aux couleurs :

Rouge = MOI - SOI
GRIS = VOUS
BRUN = Tertiaire - MONDE
Orange = Poisson noétique
Turquoise = Personnages
Bleu = Oeil du cyclone - Mort
Rose = Les sophistes
Vert = Les questions
Mes commentaires

Par rapport à nous ~~~~~~~~~~~ Par rapport à soi




Cours en différé du 18 décembre 2010 - Cours6 de Bernard Stiegler à l'école de philosophie d'Epineuil le Fleuriel,

Mes prises de notes 29 novembre-...décembre 2014